LES FILS DE LA MEDINA 1959 de Naguib Mahfouz

Comment parler simplement de ce roman tout en images, tout en subtilité? Pas facile. Je pense que « les fils de la Médina » démontre, à lui tout seul, le génie de cet auteur, sa capacité à dépeindre si intimement une société qui se meurt, par petits coups de pinceau légers, aériens, l’air de rien. J’ai choisi ce livre car il représente bien l’observation critique de Naguib Mahfouz, son intégrité humaine, son respect de l’Humain.

Dans ce roman, l’écrivain décrit une société microcosmique d’un quartier de la vieille ville du Caire. Une société faite de personnages hétéroclites (mendiants, marchands ambulants, fumeurs de haschisch, enfants etc.). Tout ce petit monde mène une vie tumultueuse sous la houlette d’hommes riches sans foi ni lois qui font régner la terreur. Naguib Mahfouz décrit, ainsi, la prise en main de la société par une poignée de fanatiques, les ulémas. Il critique le matérialisme dominant ainsi que l’athéisme qui gangrène la société Cairote, mais qui n’est d’aucune aide pour les personnes dans le besoin. Il dépeint une société rongée par la corruption et l’injustice.

L’histoire est toute simple en apparence et bien compliquée. Le fondateur du quartier se retire du monde et passe le flambeau à son second fils Adahm car son fils aîné Idris, un homme colérique, a été expulsé du quartier. Cependant, Adahm, pour avoir révélé un grand secret est destitué et obligé de travailler pour vivre.  Sa femme sera la première à enfanter dans la douleur. Les deux fils qu’ils auront vont s’entretuer.

En arabe, ce roman s’intitule « les habitants de notre quartier ». La description réaliste de la société Cairote lui valut les foudres des critiques qui y virent d’abord une satyre sur Gamal Abd El Nasser, le Président de l’époque. En fait, Naguib Mahfouz raconte avec brio, la bible. Gabalawi, le personnage principal représente Dieu et sa mort est le synonyme de la naissance de l’athéisme. L’histoire de ce vieux quartier rappelle la Genèse (Bible) où Adam et Eve sont chassés du paradis pour avoir bravé l’interdit (mangé la pomme) et Caïn et Abel, les frères fratricides. Eve, pour avoir offert le fruit interdit à Adam sera condamnée, ainsi que toutes les générations suivantes à enfanter dans la douleur.

Ce livre fut jugé blasphématoire et interdit en Egypte. Il fut édité au Liban en version light en 1967. Lorsque Naguib Mahfouz reçut le prix Nobel de Littérature en 1988, Nasser souhaita lever cette interdiction. Naguib Mahfouz refusa pour éviter de provoquer les fanatiques. Ce qui ne l’empêcha pas d’être agressé par eux, au couteau, en 1994. Il perdit l’usage de sa main droite et ne put plus jamais écrire. Il trouva rapidement une solution: dicter ses romans.

CE LIVRE EST UN VRAI PETIT BIJOU DE LA LITTERATURE ARABOPHONE.

 

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