Le silence des collines – Béatrice Uwambaje – 2019

Quatrième de couverture

Une Rwandaise témoin du génocide revient, 23 ans après, sur les lieux du drame. Entourée de son fils survivant et de ses deux enfants métis, elle tente de rétablir la relation avec ceux qui sont désormais les acteurs d’une société transformée. Le personnage-narrateur, un double qui regarde l’auteur, observe, se souvient, scrute, analyse. A la fois intime et pudique, soon récit oscille entre évocation, litanie, métaphore passé, présent. Un témoignage sensible et puissant  sur ce que peut la littérature après l’irréparable.

Chronique

Nous avons tous entendu parler du génocide qui s’est déroulé au Rwanda. Certains y ont assisté, impuissants devant leur téléviseur. Mutesi en a été victime. Elle y a perdu toute sa famille. Elle y a survécu. Mais, à quel prix! Aujourd’hui, les collines sont silencieuses. Ce qui n’a pas toujours été le cas. On dit souvent que l’assassin revient sur le lieu de son crime. On oublie que la victime aussi. Mais pas pour les mêmes raisons. La victime a besoin de comprendre, d’expier le cauchemar.

Mutesi est retournée dans son pays beaucoup plus tard. Pour comprendre la folie humaine. Pour comprendre à quel moment son monde, si tranquille, s’est écroulé. A quel moment l’humain a perdu son humanité et retrouvé sa bestialité. Pas facile. Surtout quand on doit faire face au mutisme collectif. A la honte collective. Cependant, les souvenirs affluent. Les questionnements aussi. Surtout sur ce moment où l’amitié, la fraternité, la complicité entre voisins ont disparu. Ces moments de partage ont été oubliés. La barbarie a vu le jour et l’humanité a basculé dans l’horreur. Dans le sang. Seul témoin de cette tuerie, le grand arbre devant la maison familiale, gardien des générations et des souvenirs bons ou mauvais.

Le silence des collines est un pèlerinage. Sur un sanctuaire. Sur une terre sacrée profanée un jour de 1994. C’est un pèlerinage dur, nostalgique d’avant l’évènement fratricide. C’est le cheminement d’une douleur longtemps tue. Un pèlerinage qui permet de verser ces larmes enfouies dans son âme. Par pudeur. Par stupeur. Par peur. Un pèlerinage qui permettra d’accepter la vie. D’accepter le fait d’avoir survécu. D’accepter d’avoir le droit de vivre comme les autres. C’est aussi un pèlerinage-tourisme qui démontre à quel point la vie a changé sur cette terre souillée jadis.

Le silence des colines est un écrit entre narration, poésie et souvenirs. Une narration qui nous emporte dans les souvenirs d’une femme dont la vie, un  jour, fut brisée dans la violence. Un écrit qui nous fait revivre les cauchemars d’une victime. Un cauchemar sur les collines de l’horreur qui fut le début d’une longue fuite. Une fuite hagarde. Sanglante. Une fuite facilitée par de bons samaritains. Pendant un temps indéfini. Aujourd’hui, libérée de sa colère, de sa culpabilité, Mutesi écoute le silence des collines.

Note 18/20

9791033401704    Ed. Sépia/L’Harmattan    258 p.    22€

 

 

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